Oui, encore un jeu de cartes / roguelite dans la veine de Slay the Spire et consorts. Mais le studio Tavrox Games se distingue de la masse en optant pour une thématique atypique avec Neurodeck : celle des maladies mentales. S’il est toujours intéressant d’aborder des sujets sensibles ou marginaux par le prisme du jeu vidéo, le traitement s’avère souvent piégeux et l’intérêt, sujet à caution...
Durant chaque partie, votre personnage (parmi 2 disponibles) doit affronter une série de phobies avant de faire face à une "peur" finale. Ces pathologies s’attaquent à votre endurance physique et votre santé mentale, la perte de cette dernière entraînant un game over. Pour lutter, vous disposez de cartes symbolisant des éléments plus ou moins positifs : nourriture, câlins, balades, croyance spirituelle, respiration profonde, punching ball, amis… Certaines permettent d’affaiblir vos phobies, d’autres de regagner de la santé physique et mentale. Autant dire que les amateurs du genre ne seront pas perdus.
Cela étant dit, Neurodeck ne se limite pas à un vulgaire habillage. On sent que les développeurs ont fait un réel effort pour explorer la thématique, par exemple à travers les animations "offensives" des phobies. La personnification de l’agoraphobie est évidement une foule qui va soudainement vous pointer du doigt ou chuchoter tout en vous dévisageant. La tocophobie (peur de la grossesse ou de l’accouchement) prend la forme d’une femme enceinte soudainement déformée par les coups de poing du bébé qu’elle porte ou traînant la peau distendue de son ventre post natal. Malgré un design simplifié, le jeu peut se montrer visuellement perturbant dans sa représentation des terreurs, ce qui est certainement le but recherché.
De plus, entre les combats, vous retrouverez certes des possibilités classiques (obtenir de nouvelles cartes, en changer ou en enlever, renforcer vos attributs…) mais parfois sous des formes originales. Ainsi, l’obtention de traits (bonus) se fait via une série de questions d’ordre comportemental. Et dans certains cas, vous pouvez lire des témoignages de personnes souffrant de troubles spécifiques, non pas pour débloquer une quelconque récompense, mais simplement pour vous instruire. L'effort est louable. Sans doute Neurodeck peut-il prétendre offrir un aperçu du sujet aux personnes épargnées par ce genre de troubles, pour inciter à faire preuve d’un peu plus d’empathie envers celles qui en souffrent. Néanmoins, difficile de croire que le titre possède un réel potentiel thérapeutique.
Du coup, assez logiquement, l'intérêt à long terme de Neurodeck repose avant tout sur son gameplay. Or en l'état, le résultat s'avère largement perfectible... Les mécaniques nous forcent à gérer des limitations (actions), des ressources (endurance et mental) et des étapes (poser un objet puis utiliser l'objet) qui complexifient les choses, sans forcément les rendre plus intéressantes ou novatrices. Les cartes en elles-mêmes semblent posséder un nombre limité de synergies. Les "decks" que l'on construit manquent du coup de polyvalence, ce qui est problématique face aux phobies qui, à défaut d'être nombreuses, constituent des menaces très variées. Enfin, la difficulté demande encore un gros travail d'équilibrage.