Comme souvent, nous regrettons amèrement le manque de curiosité d'une partie de notre petite communauté pour les contenus moins tape-à-l’œil, mais comme promis, nous vous proposons une critique écrite de Bye Sweet Carole, le jeu de Little Sewing Machine qui arrive dès demain sur consoles et PC. On souhaite une bonne lecture à celles et ceux qui s'y risqueront.
La première chose qui frappe en lançant Bye Sweet Carole, c'est évidemment son incroyable esthétique et ses superbes animations. L’hommage aux grands classiques 2D de Disney est frappant et pour peu que l’on soit un joueur avec un minimum de bouteille, impossible de ne pas y voir la réalisation d’un fantasme d’enfant qui, sur des consoles comme la Megadrive et la Super Nintendo, avait déjà l'impression de pouvoir revivre ses plus grands dessins animés grâce au talent des développeurs de l’époque. En revanche, si les Aladdin, Le Roi Lion, Le Livre de la Jungle, Mickey Mania, Castle of Illusion et tant d’autres optaient pour le genre phare de l'époque, Bye Sweet Carole s’aventure sur d’autres chemins. Difficile donc de ne pas voir les références que sont Another World et Heart of Darkness, pour les pièges mortels dans lesquels la jeune héroïne peut parfois tomber, Clock Tower, avec la menace d’ennemis errants aux pulsions meurtrières, et plus globalement, le genre point and click, Bye Sweet Carole structurant sa progression par le biais d'énigmes, qu’il faut résoudre après avoir déniché les bons objets. L’histoire du jeu s’intéresse au destin de Lana Benton, une jeune orpheline anglaise qui, après s'être endormie en classe, fait un bien étrange rêve, qui va rapidement tourner au cauchemar, et même finir par la rattraper une fois de retour dans la réalité. Quand l’aventure commence, la jeune fille se rend très vite compte qu’elle est capable de communiquer avec les oiseaux, qui semblent reconnaître en elle la princesse du royaume de Corolla. Lana croisera d’autres personnages qui tiendront le même discours, mais tous ne feront pas preuve de la même bienveillance. Avec une ambiance plutôt sombre, Bye Sweet Carole donne l’impression de traverser un long métrage d’animation Disney qui serait passé à la moulinette horrifique. La qualité des animations, le trait fin du dessin, la musique, toute la partie artistique de Bye Sweet Carole est une franche réussite, mais côté gameplay, le bilan est un brin plus nuancé.
En cause, les passages où Lana est traquée par un adversaire alors qu’elle doit résoudre des énigmes ne fonctionnent pas vraiment comme ils le devraient. Ce n'est pas tant qu’ils soient difficiles, la fuite étant généralement assez aisée, d’autant que l’héroïne acquiert rapidement la capacité de se transformer en lapine, ce qui la rend à la fois un peu plus rapide, mais aussi plus habile (elle peut alors sauter, y compris d’un mur à l’autre). Des cachettes lui permettent aussi de se mettre à l’abri, à condition de bien retenir sa respiration quand son poursuivant se rapproche d’elle. Le problème, c’est que ces séquences finissent par être plus contraignantes qu’autre chose. On se retrouve forcé de faire des allers-retours (déjà potentiellement nécessaires pour la résolution des énigmes) pour, par exemple, faire sonner de petites clochettes qui vont attirer la bonne démoniaque dans la zone, ou à devoir prendre ses jambes à son cou et filer jusqu’au prochain écran pour y trouver une cachette, avant de pouvoir reprendre le fil de ses activités. C'est dommage, car même si l’on comprend parfaitement l’intérêt de telles séquences d’un point de vue narratif, on ne les trouve pas très amusantes à jouer dans la pratique. Il faut toutefois souligner l’effort de proposer des situations un peu variées à ce niveau, puisque la plupart des ennemis peuvent être “contrés” de différentes manières. On n’ira donc pas jusqu’à dire que cela ruine l'expérience globale, mais comme on se retrouve confronté à ce genre de passages dès le chapitre 3, cela vient un peu tempérer l’enthousiasme que l’on peut ressentir au départ. Au final, on leur a souvent préféré les quelques moments plus scriptés où Lana est poursuivie par une menace car ces séquences s’inscrivent justement plus dans une volonté narrative que purement ludique.
L’essentiel de l’expérience reste cependant plus tourné vers des mécaniques de point and click où l’on nous demande de déplacer des objets, de les combiner, de grimper dessus pour atteindre des mécanismes, de nous déplacer le long de rebords en maintenant notre équilibre par le biais d’un mini-jeu, de nous transformer en lapin pour accéder à certaines zones inaccessibles, ou encore de prendre le contrôle de Baesie, notre compagnon d’infortune. Quand sa tête est séparée de son corps, ce dernier peut, par exemple, être aplati complètement pour lui permettre de se glisser dans certains conduits, traverser les flammes (et prendre feu, pour déclencher un incendie et faire fuir une menace, par exemple), conduire le courant, et donc aider Lana à progresser quand elle doit faire face à certains obstacles. Le passage de l’un à l’autre se fait via la touche droite de la croix directionnelle, et avec la transformation en lapine (touche B), cela apporte une petite touche de variété bienvenue assez tôt dans l’aventure. Bye Sweet Carole propose également quelques passages un peu différents, dont l’un, musical dans son approche, revient d’ailleurs à plusieurs reprises, pour un résultat relativement moyen. Si ces séquences apportent un peu de renouveau quand on les découvre, elles sont parfois un peu trop longues pour leur propre bien et auraient donc gagné à être écourtées quelque peu. Une fois encore malgré tout, cela n’enlève rien au charme de l’aventure, qui parvient à faire oublier ces quelques petites maladresses. La séquence finale, elle aussi plutôt audacieuse dans l’hommage qu’elle entend rendre à un autre genre de jeu, est tellement soignée dans sa mise en scène qu’on lui pardonne aisément sa très grande facilité par exemple. Bye Sweet Carole n’est donc pas pas parfait, mais son aspect graphique, son univers, son histoire, son ambiance horrifique et toute sa partie aventure le rendent parfaitement recommandable pour son prix (19.99€), même si son message aurait clairement pu être amené de façon plus subtile.